Une bonne connaissance du sens du bois facilite la compréhension de son utilisation sur le tour. En simplifiant, le bois pousse suivant un axe (le tronc) puis se sépare en ramifications (branches). L'axe de l'arbre (ou de la branche) s'appelle le cœur. Autour de celui-ci, les cernes annuels forment des couches qui se superposent. L'écorce recouvre les cernes tout en protégeant le bois neuf. Lorsque l'on prélève une section de branche, on retrouve tous ces éléments en observant la coupe (A). La façon la plus courante d'utiliser un tel morceau sur un tour, est de confondre l'axe de ce dernier avec l'axe de la branche. On dit alors que l'on travaille du bois de fil car toutes les fibres sont orientées dans le même sens et disposées autour de l'axe de manière presque symétrique (cernes). Chaque extrémité se présente en bois de bout.
Les troncs de gros diamètre sont découpés en scierie, en plateaux ou planches (A). Le sciage est parallèle à l'axe de l'arbre. Si l'on prélève un carrelet dans un plateau, on se retrouve avec seulement une partie de la bûche (B). Les fibres sont bien toujours dans le même sens mais les cernes sont incomplets. On dit alors que le bois est de fil lorsque la position du cerne par rapport à l'axe du tour est la même que celle qu'il occupait dans le tronc par rapport au cœur. Sinon, on dit qu'on se trouve à contre-fil.
Le bois de bout est toujours aux extrémités. Prélevons maintenant un disque dans un plateau (C). Lorsque l'on va monter la pièce sur un mandrin, l'axe de celle-ci se retrouvera perpendiculaire à l'axe du tour. Si l'on travaille sur la tranche, nous aurons alternativement du bois de fil ou contre-fil et du bois de bout. Si l'on travaille la face, on dit que le bois est de travers. Nous venons de passer en revue les différentes façons de couper le bois pour servir d'ébauches dans une majorité de cas.
Retenez bien ces appellations : bois de fil, bois de contre-fil, bois de bout, bois de travers, car ces termes reviennent souvent dans les articles consacrés à l'utilisation des outils ou aux réalisations de pièces tournées.
Le sens de coupe
• Quand on coupe du bois avec une machine, ou à la main, on s'aperçoit assez rapidement que certaines coupes sont plus faciles à faire que d'autres. C'est la façon dont on sectionne les fibres composant le bois qui donne cette impression. Avec une scie à main, il est bien plus facile de débiter une branche en rondin que de la débiter en planches. Dans le premier cas, nous sectionnons les fibres perpendiculairement à l'axe ; dans le second cas, on coupe les fibres parallèlement à l'axe et c'est plus dur ! Notre scie semble suivre un parcours que nous n'avions pas prévu. En fait, elle suit le fil du bois.
• Imaginez maintenant que votre bois se compose d'une multitude de baguettes, bien rangées côte à côte. Si l'on effectue une coupe transversale dans ce paquet, les premières baguettes seront soutenues par celles qui se trouvent dessous. Au cours du sciage, et tant que les baguettes seront soutenues, la scie attaquera aisément et coupera chaque baguette proprement. Lorsque le soutien disparaîtra, la scie poussera la baguette dans le vide. Celle-ci va se mettre à trembler et rendre la coupe plus difficile. En outre, à la sortie du bois, la baguette va casser, provoquant des éclats de part et d'autre de la coupe.
Transposons cette démonstration à la structure du bois. Les baguettes représentent les fibres. Celles-ci sont disposées serrées autour du cœur. Si vous coupez deux planches l'une sur l'autre avec une scie à main, le dessous de la planche supérieure présentera peu d'éclats. Alors que, sous la seconde, vous pourrez constater les dégâts.
• Deuxième observation, imaginez que vous voulez tailler un crayon de papier à l'aide d'un cutter (outil très tranchant). Vous allez poser votre cutter sur l'extérieur du crayon et, suivant un angle d'inclinaison assez important par rapport à l'axe, vous allez pousser votre cutter vers le centre (la mine). Un joli copeau se formera et vous répéterez ce geste tout autour du crayon pour l'affûter. Il ne vous viendrait pas à l'idée d'opérer en sens inverse ? Si vous voulez essayer, je vous conseille de maintenir fermement votre crayon dans un étau puis, à l'aide d'un maillet, de taper du centre vers l'extérieur. Résultat : le crayon sera sans doute fendu suivant son fil et les éclats autour de la mine ne risqueront guère de la soutenir.
Voilà ! Vous savez maintenant que, pour couper correctement son bois sur le tour, il convient d'appliquer ces principes : couper toujours une fibre courte sur une plus longue (elle lui sert de soutien) et attaquer le bois avec un angle permettant le tranchage des fibres et non leur éclatement.
Sur le tour, le bois étant en rotation, il vous sera parfois difficile de déterminer dans quel sens vous devez pousser votre outil. Pour simplifier, voici les grandes règles :
- lorsque l'on travaille entre-pointes ou en l'air et que le bois est de fil ou contre-fil, la progression se fait toujours du grand diamètre vers le petit.
On dit alors que l'on couche les fibres.
- lorsque le bois est de fil ou de contre-fil et que l'on travaille son extrémité, donc le bois de bout, la progression pour le creusage se fait du centre vers l'extérieur (petit diamètre vers grand diamètre). Pour l'extérieur, même règle que précédemment.
- lorsque l'on travaille du bois de travers, si l'on veut coucher les fibres, la progression se fera du petit diamètre vers le grand pour l'extérieur. A l'inverse, pour le creusage, la progression se fait du grand diamètre vers le petit.
Nous venons de faire le tour du tournage sur bois. Comme vous pouvez le constater, le domaine est large et ouvre de multiples possibilités. Mais la pratique, qui peut sembler simple, n'est pas danger. Aussi prenez toutes les précautions nécessaires, et à votre tour !
écrit par Pat Ganot, Le Bouvet