Le tadelakt est un enduit très ancien, qui se pose aussi bien en extérieur qu'en intérieur. Il est réputé pour la réalisation de salles de bain, douches, baignoires, lavabos, fontaines..., car sa particularité est d'être imperméable. Impossible de parler tadelakt sans parler de Marrakech. Ce sont en effet les impuretés propres à la chaux de Marrakech qui lui confèrent ses vertus, notamment sa résistance à l'eau. En France, ces impuretés mystérieuses sont généralement remplacées par de la poudre de marbre dans un savant mélange à base de chaux aérienne. Emilien Bique, spécialiste des enduits à la chaux, a mis au point sa propre recette, fruit de son expérience, dont il garde jalousement le secret. Il faut dire qu'on ne plaisante pas avec le tadelakt... Nous sommes bien loin des finitions obtenues par les mélanges prêts à l'emploi que l'on peut trouver dans les magasins de bricolage sous le nom de « effet tadelakt ».
Par contre, vous pouvez vous essayer au vrai tadelakt, en suivant un stage, à l'image de ceux dispensés par la société Akterre (voir encadré), mais pour un fini parfait, rien ne vaut l'expérience et le geste sûr de l'artisan spécialisé. Car le tadelakt ne s'apprivoise pas comme ça. C'est un peu comme le vernis au tampon pour l'ébéniste ! Un travail qui nécessite patience et savoir-faire. L'enduit résulte de la carbonatation de la chaux qui réagit différemment dans ses échanges gazeux selon les supports et l'hygrométrie ambiante. Quelques minutes de trop et l'enduit faïence ! C'est la catastrophe... qui peut se rattraper, mais qui, parfois, nécessite aussi de tout recommencer.
Un vieux rêve
Christian et Claudie sont de grands voyageurs, passionnés par l'Afrique. Ils rêvaient depuis des années de décorer le salon avec un véritable tadelakt réalisé dans les règles de l'art. Ils ont choisi des teintes ocre jaune et chocolat sur des échantillons d'enduits terminés. Compte tenu de la surface à réaliser, qui dépasse les 20 m2, Emilien s'est fait seconder par Nathalie Mahiet, stucateur en région parisienne. Car, pas question de procéder par zones, il faut directement couvrir le mur entier, tout raccord étant impossible avec le tadelakt. Les murs étaient recouverts de plâtre, un support relativement docile. Après passage d'une couche d'1 mm de chaux, sable et colle (Facim), l'enduit est appliqué à la lisseuse en une fois.
Il s'agit d'une épaisseur de 5 mm qui, rapidement, va être travaillée à la taloche et à l'éponge par des gestes circulaires. Dès que la réaction commence, un pré-serrage est effectué à la langue de chat, puis à la plastica, sorte de lisseuse en plastique souple qui joue sur la surface, et enfin au galet qui écrase l'enduit pour le « fermer ». Il s'agit, d'un galet de rivière en granit, pierre semi-précieuse, agate, améthyste... C'est à force de « ferrer » l'enduit que les magnifiques nuances apparaissent, captant la lumière avec des déclinaisons douces.
Pour se guider dans les épaisseurs, Emilien se repère aux petits graviers de 3 mm de diamètre présents dans le mélange. Ensuite, c'est l'expérience qui dicte ses gestes réguliers et sûrs. A un moment précis, l'enduit se durcit, c'est là qu'il faut le retravailler. La moindre bulle d'air est lissée. Progressivement, le mur se polit. Il changera encore d'aspect quelques jours plus tard, au passage du savon noir au spalter, un large pinceau, puis s'éclaircira au séchage. Il faut plusieurs mois avant que l'enduit sèche en profondeur.
Le tadelakt destiné aux pièces humides est plus épais et davantage travaillé au galet. Dans tous les cas, c'est une finition saine, qui participe au confort thermique de la pièce en ajoutant de la masse. C'est ce qui en fait un matériau de choix pour les régions chaudes. L'aspect fini est doux et flatte l'oeil avec des reflets de lumière. Ocres de Provence, rouges Marrakech, blancs Andalous, bleu Majorelle, gris métal, vert olive..., la gamme de possibilités est vaste. Rien de tel pour mettre en avant tableaux et objets d'art évocateurs du soleil méditerranéen.